Intéressez-vous aux différents sons de votre environnement actuel. Y en a-t-il un que vous n'aviez pas remarqué jusqu'ici ? Si c'est le cas, vous pouvez constater que c'est au moment de porter votre attention sur ce son que vous l'avez finalement remarqué : l'attention sert donc à mieux percevoir. Et même souvent à percevoir ce qu'on ne percevrait pas sans attention (ce qui pose d'ailleurs une question qui rend perplexe de nombreux chercheurs : « comment porter son attention sur une perception qui n'en était pas une avant d'y faire attention ? », mais c'est une autre histoire).

Choisissez ensuite un son d'intensité normale se répétant de temps en temps (les bruits de pas du voisin, le gloussement du pigeon ou le chant d'un merle) et préparez-vous à faire un mouvement de l'index dès que vous l'entendrez à nouveau. Constatez que même si vous n'avez pas absolument besoin de faire attention à ce son pour l'entendre, vous y faites malgré tout attention pour y réagir rapidement : l'attention sert également à réagir vite.

Dans le cerveau, l'attention est un mécanisme qui permet de faciliter l'activité et l'influence de certaines parties du cerveau aux dépens d'autres. Quand ce mécanisme s'applique à une région spécialisée dans un certain type de perception (par exemple la perception de la couleur bleue), celle-ci devient plus réactive et nous devenons plus sensibles à cet aspect sélectivement : c'est ce que nous faisons spontanément pour rechercher un pantalon bleu dans un étalage de magasin, nous faisons attention "à ce qui est bleu". Ce mécanisme de réglage de sensibilité est à l'œuvre dans toutes les modalités sensorielles pour écouter spécifiquement le violoncelle dans un concerto ou la voix de son enfant dans la chorale du mercredi, ou pour juger si le riz est assez salé ou si on a encore mal au talon. C'est ce qu'on appelle l'attention sensorielle, qui permet de sélectionner une perception sensorielle en particulier. Cette attention est dite sélective, car elle ne sélectionne qu'une cible à un instant donné.

Si vous en avez la possibilité, allumez maintenant deux postes de radio en même temps, ou la télé et la radio, sur deux émissions différentes au cours desquelles des personnes parlent. Essayez de faire attention alternativement à chacune des stations en constatant la manière dont cela affecte votre compréhension à chaque fois, de l'une et de l'autre : sans attention, n'est-il pas difficile de suivre une conversation ? L'attention permet également de comprendre et même de mémoriser.

Si vous en avez le temps, interrogez-vous d'ailleurs sur ce que vous perceviez de la conversation à laquelle vous ne prêtiez pas attention l'instant d'avant : que pourriez-vous en dire ? La conversation était-elle animée ? Étaient-ce des hommes qui parlaient, des femmes ? Vous pourrez sans doute ainsi remarquer qu'être inattentif, ce n'est pas « ne rien entendre », et nous sommes capables de saisir beaucoup d'informations simples même quand nous ne sommes pas attentifs.

L'inattention ne rend pas sourd, mais elle empêche de comprendre. L'attention établit une connexion privilégiée avec un objet, une tâche ou une personne et permet d'être dans une réelle interaction au sein de laquelle notre cerveau s'implique sans retenue.

Bibliographie : Lachaux J.-P., Le Cerveau attentif. Contrôle, maîtrise et lâcher-prise, Paris, Odile Jacob, 2011 Lachaux J.-P., Le Cerveau funambule. Comprendre et apprivoiser son attention grâce aux neurosciences, Paris, Odile Jacob, 2015 Chabris C., Simons D., Le gorille invisible. Quand nos intuitions nous jouent des tours, Paris, Le Pommier, 2015